LE DIAGNOSTIC ELECTRIQUE, UNE CAUSE DE NON-DECENCE ?

Un bien qui présente un danger pour la santé et la sécurité de ses occupants est réputé non-décent. En clair, interdiction de le louer. Ce qu’illustre une récente jurisprudence. Dans cette affaire (*), les diagnostics immobiliers -en particulier le diagnostic électrique-, ont permis de mettre en lumière que le logement ne pouvait être utilisé conformément à sa destination. La cour d’appel donne en partie raison à la locataire qui avait suspendu ses loyers…

Premier bilan électrique par la justice

Le propriétaire réclamait quelque 5 000 euros d’arriérés de loyers à cheval sur 2016 et 2017. Pour justifier le non-paiement de ses loyers et charges, la locataire de cet immeuble à usage mixte commercial et habitation invoquait de nombreuses anomalies concernant :

• La plomberie

• L’électricité

• Les menuiseries

• Les murs…   
Un véritable inventaire à la Prévert. Insuffisant toutefois pour le tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne car ne reposant sur aucun diagnostic technique immobilier.  

En juin 2018, le juge avait donc condamné la locataire à s’acquitter de sa dette : l’exception d’inexécution -mécanisme permettant à un contractant de ne pas se soumettre à ses obligations- reste liée à l’existence de désordres rendant impossible l’utilisation des lieux conformément à leur destination. Autrement dit, pour cesser de payer ses loyers, le logement doit être réputé nondécent.  

Diagnostic électrique non conforme

En février, la cour d’appel de Reims a cependant retenu les manquements du bailleur à son obligation de délivrance d’un logement décent. Dans son arrêt, la cour évoque les conclusions du diagnostiqueur électrique dans le cadre de l’expertise judiciaire :  

• Des revêtements contenant du plomb « au-dessus des seuils en vigueur » ;

• La présence d’humidité, la présence de trainées sous un soupirail « montrant la pénétration d'eau par cette voie, nonobstant la présence sous le dit soupirail d'une prise électrique, rendant les biens loués impropres à leur destination. »

• Et surtout « des anomalies de l’installation intérieure d’électricité, à l’égard de laquelle il (le diagnostiqueur électrique) recommande vivement d’agir afin d’éliminer les dangers qu’elle présente ».  

« Il sera précisé sur ce dernier point que l’électricité lui est apparue ancienne avec des fils dénudés sortant des boîtes, des dominos apparents, de vieux plombs et des éléments de porcelaine. »


Bailleur : obligation de délivrer un logement décent

Revirement, donc, la cour d’appel de Reims infirme le jugement rendu en première instance. « Eu égard aux manquements indubitables du bailleur relativement aux réparations lui incombant et à l’obligation de délivrer un logement décent, avec les différents diagnostics immobiliers en conformité.  
Il conviendra d’accueillir l’exception d’inexécution à hauteur de la moitié des sommes dues par la preneuse, étant rappelé qu’elle n’allègue ni n’établit aucune impossibilité d’exploitation commerciale. » L’ardoise de la locataire n’est pas effacée totalement, seule la dette correspondant aux loyers de son habitation principale. Pour la partie commerciale du bien loué, rien n’empêchait en effet la locataire de continuer à exercer son activité de coiffure. 



(*) Cour d’appel de Reims, 5 février 2019, n° 18-016531. 

DETAILS SUR DIAGNOSTIC ELECTIQUE

6 Mai 2019